Tout le monde connaît leur tube « U-Turn (Lili) », qui a bercé le film français « Je vais bien ne t'en fais pas » et fait exploser Olivier et Simon, le duo d'Aaron. Victoire a craqué pour eux lors d'un concert privé à Bruxelles. Rencontre, quelques semaines plus tard, pour une séance mode et quelques bavardages comme on les aime.
Quelques mesures d'une mélodie imparable portée par une voix fragile ont suffi pour porter le duo Aaron de leur home studio aux salles de concert et aux scènes de grands festivals d'été. 130.000 albums vendus, 250.000 connexions sur leur page MySpace et 500.000 streamings de la vidéo de « U-Turn (Lili) » sur YouTube, Simon Buret et Olivier Coursier vivent un rêve éveillé. Ça tombe bien car c'est dans les rêves qu'ils puisent une partie de l'inspiration pour leur musique aux ambiances ouatées, tendues et frissonnantes d'émotion. Bien de leur personne, les deux garçons ne rechignent pas trop à poser devant les caméras. Pour Victoire, ils ont joué la musique des étoffes.Appréciez-vous ce genre de prestations, qui vous éloigne du monde de la musique ?Simon: C'est mon ancien métier, j'ai été mannequin pendant plusieurs années. Ça peut être drôle, surtout quand on investit des endroits particuliers. Pour Vogue, on a fait un shooting dans un zoo avec des orangs-outans. Ca changeait d'un concert.
Comment avez-vous digéré le succès poussé par « U-Turn (Lili) » la chanson du film de Philippe Lioret ?Simon: Tout est venu très vite. Dans les moments de pression, on s'est senti protégé dans le travail. On avait le défi du concert à relever. Sur scène, on ne voulait pas reproduire l'album. Il fallait complètement reconstruire les chansons en intégrant de nouveaux instruments et en retravaillant certains passages. La musique, c'est gai quand elle est vivante. On voulait aussi que la lumière soit le troisième personnage, qu'elle ne soit pas juste un décor, mais qu'elle raconte une histoire. On a eu la chance de construire un vrai spectacle. Je n'avais jamais chanté devant des gens. Donner un spectacle devant un public n'a rien à voir avec la fabrication d'un album chez soi où l'on n'avait rien à répondre à personne. Avec notre musique, on s'inscrit un peu à contre-courant d'une époque où on met les gens en avant plus que ce qu'ils font.
Dans votre clip, vous vous êtes pourtant mis en avantSimon: Dans les clips, ce qui m'emmerde, c'est d'enfermer les gens dans une histoire. En nous montrant tels que nous sommes sur scène, on voulait laisser le public libre d'imaginer ce qu'il veut. Ne pas plaquer des images sur la musique. Mon plus grand désir serait d'arriver à n'être que des vecteurs. On voulait aussi s'amuser. On était comme des enfants. Les gens avec qui l'on travaille sont d'abord des amis.
Êtes-vous soucieux de votre look ?Simon: Aller sur scène, ce n'est pas la vie de tous les jours. C'est agréable de mettre un costume différent. Ce n'est pas juste le pote de tous les jours. C'est tout aussi intéressant pour nous que pour le public. C'est pour cela que je me maquille parfois sur scène. Ce n'est jamais une obligation pour nous. Ça doit rester du rêve et de l'amusement.
Êtes-vous sensibles à l'univers de la mode ?Simon: La mode peut être un univers intéressant. Certains vêtements sont des œuvres qui reflètent l'esprit de leur créateur avant d'être des vêtements. Avec Aaron, on ne veut pas pour autant s'enfermer dans une image. On a un accord avec une marque de vêtements qui nous laisse un grand choix. C'est quelque chose qui me plaît, j'aime bien les matières.
Olivier: On aime faire des mélanges avec des fripes qu'on va dénicher nous-mêmes.
Vous êtes-vous fort impliqués dans l'élaboration de la pochette et du visuel de l'album ?Simon: Vanessa Filho, qui a travaillé avec nous, a ciblé avec beaucoup de justesse et de finesse notre univers visuel qu'on veut sans limites. La sirène est une image très forte. C'est une ambassadrice du Neverland. Le principal, c'est que les gens puissent y trouver leur place. Je suis obsédé par les choses qui nous entourent et qu'on ne voit pas. Ce n'est pas parce qu'on ne le sent pas que ça n'existe pas. Le cerveau, c'est la porte de l'imaginaire. J'ai l'impression qu'en grandissant, les gens s'interdisent l'imagination.
Les rêves sont-ils une source d'inspiration privilégiée ?Simon: Je fais partie des gens qui se souviennent de leurs rêves. Dans la vie, j'aime bien me laisser aller. Je ne suis jamais tout seul dans ma tête. Je ne suis pas schizo, je suis juste à l'écoute. Il y a beaucoup de poésie dans le quotidien. Il suffit d'y être attentif et de s'ouvrir.
Le son de l'album est très homogène, est-ce une volonté ou le reflet de tout votre répertoire ?Simon: On voulait un album homogène qui raconte une histoire et s'écoute d'une traite. On n'avait pas beaucoup de morceaux en plus, mais on a laissé tomber ceux qui ne s'intégraient pas dans l'ensemble. On sent vite quand quelque chose nous plaît. La plupart des chansons se construisent à l'instinct. En général, le texte vient d'abord et il faut que la musique soit liée pour produire un sens. On fonctionne beaucoup par images. Le soleil qui rentre dans la mer, ça fait quoi comme son ?
Olivier: Même si les morceaux peuvent être assez différents rythmiquement et mélodiquement, il y a toujours ce fil conducteur qui vient de nous. Le premier jet est souvent basé sur le piano et la voix. Si c'est bon, on l'enregistre et ça dure rarement plus de deux jours. Ce qui peut prendre du temps, ce sont les arrangements.
Vous soulignez dans la bio que les textes sont autobiographiques, est-ce important ?Simon: Je m'en fous. Les mots sortent parce qu'à ce moment-là, j'ai besoin de les écrire sur papier. Ça ne m'intéresse pas d'écrire sur des choses qui ne me touchent pas vraiment. Chaque chanson est comme une lettre ouverte que j'envoie à quelqu'un. J'ai eu peur que les chansons soient trop intimes, de m'ouvrir trop, mais les gens s'en foutent car ils se les réapproprient. Le public prend le morceau comme il est et en fait son histoire.
Lili existe ?Simon: Tout le monde existe (sourire)
Qu'avez-vous pensé de votre expérience des festivals d'été entamée avec « Les Ardentes » à Liège ?Olivier: C'était beaucoup plus dans l'énergie. C'était un peu fou parce qu'un an avant on ne se serait jamais imaginé jouer devant autant de monde.
Simon: Ça correspond bien avec notre idée de la musique comme quelque chose qui se balade et qui n'a pas de limite. On est toujours tributaires des éléments et de l'énergie du lieu. On peut jouer un jour sur un parking et le lendemain sur une plage au coucher de soleil. Tout change tout le temps. On a joué, je ne sais plus où, dans un vieux cinéma des années 30 qui n'avait pas bougé depuis l'époque. La poussière était palpable dans les coins. Dans les festivals, c'est aussi assez tripant de rencontrer des gens comme Arcade Fire, Björk ou Feist, ça fait plaisir. Du côté public, c'est souvent le bordel. Les gens sont là depuis trois jours, parfois dans la boue. Mais au bout du compte tout ça génère une mentalité très positive.
Comment vous voyez-vous dans cinq ans ?Simon: Libres. C'est mon obsession depuis que je suis né. Pour nous, ça veut dire continuer à faire ce qu'on aime.
Aimeriez vous collaborer avec d'autres artistes ?Simon: Mon principal problème, c'est que la plupart des gens qui m'intéressent sont morts. À côté de ça, il y a aussi des gens peu connus qui méritent d'être mis en avant comme la réalisatrice de nos photos et de notre clip, Vanessa Filho, qui a une voix assez tripante. J'ai fait un duo avec Disiz la Peste, c'était plutôt drôle.
Rêvez-vous à d'autres types de projets ?Simon: J'ai hâte de retourner sur les plateaux. Mon premier métier, c'est acteur. Quand t'as un terrain créatif, une fois que tu ouvres une porte, elle ne se referme jamais vraiment. La phrase cliché qui dit que les artistes sont des éponges est assez vraie.
Que peut-on attendre du concert au Cirque Royal ?Simon: On a un vrai désir de lumière. Il y a tout pour que ce soit un beau moment pour nous. Après, j'espère que les gens vont accrocher.
Par Gilles Bechet.
EDIT Cha: la source merci -> www.victoiremag.be